Réseau RELAB : pour un suivi en temps réel des virus respiratoires au sein de la population française
Dans sa configuration pilote, des milliers d’échantillons biologiques sont analysés quotidiennement par les laboratoires de biologie médicale Biogroup et Cerballiance, et des informations cliniques sont collectées auprès des patients prélevés. Les données anonymisées sont ensuite transmises et exploitées par le Centre National de référence des Virus des infections respiratoires (Hospices civils de Lyon et Institut Pasteur de Paris). Le réseau RELAB, associé aux réseaux RENAL et Sentinelles, offre ainsi une vision très complète de la dynamique épidémique des virus respiratoires au sein de la population française. Il permet de savoir, chaque semaine et durant toute l’année, quelles sont les régions et les personnes les plus exposées, offrant la possibilité d’adapter au mieux nos comportements, d’informer les autorités de santé sur les situations épidémiques et d’anticiper l’engorgement des hôpitaux. Après une phase pilote amorcée en août 2023, RELAB livre aujourd’hui un premier bilan très prometteur, et se montre opérationnel à l’approche des Jeux Olympiques.
L’histoire du réseau de surveillance RELAB (REseaux de LABoratoires privés) commence avec celle de la Covid-19. En 2020, le Centre national de référence (CNR) des Virus des infections respiratoires collabore avec les laboratoires de biologie médicale Cerballiance et Biogroup pour différents projets de recherche autour du SARS-CoV-2. « Nous nous sommes alors rendus compte qu’il existait au sein de ces laboratoires des informations précieuses non utilisées pour la surveillance française des infections respiratoires, et qu’il serait intéressant de pérenniser la collaboration amorcée avec la Covid-19 pour d’autres virus », retrace Vincent Enouf responsable adjoint du CNR des Virus des infections respiratoires à l’Institut Pasteur. « Les laboratoires d’analyse médicale présentent un maillage territorial très fin, et sont ainsi en mesure de partager des données représentatives de toutes les régions de France, poursuit Antonin Bal virologue au CNR Virus des infections respiratoires aux Hospices civils de Lyon. Nous avons donc mis en place une étude, en conformité MR-004(3), et avons reçu un avis favorable du Comité scientifique et éthique des Hospices Civils de Lyon en juin 2023». Trois virus respiratoires hivernaux sont ciblés : le virus de la Covid-19 (SARS-CoV-2), le virus de la grippe et le virus respiratoire syncytial ou VRS responsable de la bronchiolite chez le nourisson et d’infections sévères chez le sujet âgé.
Dès l’été 2023, un circuit de collecte et de centralisation des données se met en place entre les réseaux de laboratoires Cerballiance et Biogroup d’un côté, et l’Institut Pasteur et les Hospices civils de Lyon, pour le CNR, de l’autre. La volonté de mutualiser les expertises est commune et l’adhésion des équipes immédiate. Tout commence dans l’un des 1 600 laboratoires de biologie médicale Biogroup ou Cerballiance participants à l’opération : les patients venus se faire tester pour une infection respiratoire sont informés du projet RELAB et invités à fournir un certain nombre d’informations cliniques utiles (âge, fièvre, symptômes respiratoires, vaccination Covid ou grippe, etc.). « Lorsque les patients sont consentants, nous recherchons systématiquement la présence des trois virus covid-grippe-VRS(4) dans les prélèvements nasopharyngés. L’ensemble des résultats des tests PCR et des données cliniques anonymisés, sont ensuite envoyés, tous les lundis, au CNR », décrit Vincent Vieillefond, biologiste médical et coordinateur RELAB pour Biogroup. « Dans les périodes de pic épidémique, nous avons transféré jusqu’à 33 000 données patients par semaine. C’est considérable, et cela n’a été possible que parce que nos équipes se sont fédérées autour de ce projet », complète Benoît Visseaux, biologiste médical et coordinateur RELAB pour Cerballiance.
Le CNR reçoit donc chaque lundi les données anonymisées en provenance des laboratoires, les compile dans une base de données dédiée, et produit dans les 24 heures un bulletin d’informations regroupant les données hospitalières (RENAL) et communautaires (RELAB). Dans le cadre de la surveillance des infections respiratoires aigües, ces données ont été transmises à Santé publique France au cours de la saison 2023-2024.
Les données RELAB, qui associent les résultats des tests PCR aux données cliniques des patients, offrent une lecture très précise de la circulation virale au sein de la population française. « Nous avons pu constater que le taux de positivité des patients non vaccinés pour la grippe était de l’ordre 40 %, contre seulement 20 % pour les patients vaccinés, ce qui nous montre que l’efficacité du vaccin contre la grippe était d’environ 50 % cette année », illustre Vincent Enouf. Les données récoltées – suffisamment nombreuses et représentatives pour réaliser des statistiques fiables – permettent également de connaître, à tout moment, les classes d’âge les plus vulnérables. « Pour le VRS, nous avons pu observer un rebond de l’épidémie chez les plus de 65 ans en fin d’épidémie », souligne Antonin Bal. Des informations utiles pour aider à préciser les messages de prévention délivrés par les autorités et les professionnels de santé, pour mieux identifier les populations à informer mais également anticiper l’engorgement des hôpitaux.
Parallèlement, des centaines de virus sont séquencés, chaque semaine, au CNR. « Nous avons pu séquencer de nombreux virus VRS, ce qui est très nouveau. Même en Europe, il existe peu d’informations sur les variants du VRS, constate Vincent Enouf. Or on a absolument besoin de savoir si des mutations associées à des résistances apparaissent par exemple. » De façon plus générale, ce travail de séquençage permet de connaître les variants en circulation, et de contribuer à l’élaboration des vaccins de la prochaine saison hivernale. « Chaque année, l’Organisation mondiale de la santé organise deux réunions, pour l’hémisphère Nord et l’hémisphère Sud, afin de regrouper toutes les données disponibles sur les variants en circulation et d’adapter la composition des vaccins contre la grippe explique Vincent Enouf. Et cette année, les données de RELAB ont été utilisées avec celles de RENAL et de Sentinelles, entre autres ».
Le réseau RELAB, qui a traité plus de 500 000 données patients, vient donc d’achever avec succès sa première saison hivernale 2023-2024. Les équipes ont aujourd’hui l’espoir de pérenniser cette collaboration public-privé et d’agrandir le réseau de laboratoires impliqués. À terme, l’objectif est également de faire connaître le réseau RELAB à un maximum de publics, via notamment la création d’un site internet. « Les autorités de santé, mais aussi les infectiologues, les urgentistes, les médecins généralistes, les biologistes médicaux ou encore les pharmaciens pourraient être très intéressés par ce type d’informations, ils pourraient adapter leurs conseils et mieux informer leurs patients », précise Benoît Visseaux. « Tout comme le grand public. Depuis la Covid-19, les gens sont beaucoup plus aguerris, ils savent ce qu’est un virus respiratoire, une PCR, un variant… et ils sont en demande d’informations », poursuit Antonin Bal.
« Lors des Jeux Olympiques de Paris le réseau RELAB sera actif, tout comme le réseau RENAL au niveau hospitalier, et en mesure d’informer les autorités de santé, semaine après semaine, de la situation épidémique concernant les virus respiratoires. » conclut Pr Bruno Lina, responsable du Centre national de référence des Virus des infections respiratoires aux Hospices Civils de Lyon.
Des virus sous surveillance
Le Centre National de Référence (CNR) des Virus des infections respiratoires participe à la surveillance des virus respiratoires qui circulent en France, dans la population et en milieu hospitalier. Pendant la période de surveillance active, il compile les données de la surveillance virologique issues des réseaux Sentinelles, RENAL et RELAB et les transmet de façon hebdomadaire à Santé Publique France qui intégre ces données pour la réalisation du bulletin hebdomadaire de surveillance des infections respiratoires aigües.