Un algorithme pour mieux anticiper la réponse au traitement du cancer de l'ovaire
Capitalisant sur 10 ans de recherche sur le cancer de l’ovaire, le Pr Benoit YOU et son équipe de recherche au CICLY (EA 3738 UCBL1) ont développé un algorithme baptisé KELIM CA-125 qui modélise le comportement de ce marqueur sanguin.
Le cancer de l'ovaire : un des cancers les plus difficiles à traiter
Le cancer de l’ovaire touche environ 4 700 nouvelles patientes en France par an, dont presque la moitié a plus de 70 ans au moment du diagnostic. Compte tenu de sa faible incidence, ce cancer est considéré comme une maladie rare.
Dans 10% des cas, son origine est génétique et principalement en rapport avec une mutation du gène BRCA. Dans les autres cas, des facteurs de risque ont été identifiés tels que la ménopause tardive, l’infertilité ou l’absence de grossesse.
Diagnostic tardif, dispersion à l’abdomen aux stades avancés, résistance aux médicaments… le cancer de l’ovaire est l’un des plus difficiles à traiter. Si la chirurgie demeure le traitement de référence du cancer de l’ovaire, une chimiothérapie est presque toujours associée selon le stade et la localisation de la tumeur. Le problème : certains cancers répondent incomplètement au traitement par chimiothérapie, récidivent ou développent des résistances aux médicaments. Le choix et la rapidité d’orientation ou de réorientation de la stratégie thérapeutique deviennent alors un enjeu de taille pour les médecins et leurs patientes.
Le KELIM CA-125, un outil d’aide à la décision thérapeutique dans le cancer de l’ovaire
Dans la prise en charge standard du cancer de l’ovaire, l’efficacité des traitements est évaluée à chaque cure de chimiothérapie par le dosage d’un marqueur sanguin, le CA-125. Cependant, les variations des méthodes de dosage traditionnelles et la variabilité interindividuelle rendent l’interprétation de ce dosage empirique.
L’algorithme définit une valeur seuil en dessous de laquelle le traitement anticancéreux peut être considéré efficace, et au-dessus de laquelle il est préconisé d’adapter le traitement pour contrer la faible chimiosensibilité de la tumeur de la patiente et améliorer son pronostic.
« L’un des apports scientifiques majeurs de l’ensemble des travaux sur le KELIM a été d’aider la communauté scientifique à mieux comprendre le rôle majeur de la chimiosensibilité dans le traitement médico-chirurgical des cancers de l’ovaire, et son impact par rapport à celui de la chirurgie » explique le Pr Benoit YOU.
Un outil rapidement adopté par la communauté internationale
L’utilité de cet algorithme dans la prise en charge des cancers de l’ovaire a été validée rétrospectivement sur près de 13 000 patientes, a fait l’objet de deux publications dans le prestigieux Journal of Clinical Oncology en juillet et décembre 2022. Un essai clinique prospectif randomisé promu par le Groupe coopérateur ARCAGY/ GINECO et dont l’investigateur principal est le Pr Gilles FREYER, chef du service d’oncologie médicale de l’hôpital Lyon Sud, a été lancé en 2022 sous le nom de NIRVANA-1 devrait permettre de confirmer ces résultats prospectivement.
A l’occasion du congrès annuel du GCIG (Gynecological Cancer InterGroup) en octobre 2022, un groupe de travail international rassemblant les experts de neuf pays, a été mis en place à l’initiative du Pr Benoit YOU, afin d’échanger sur l’utilisation du KELIM CA-125 et évaluer son impact dans la pratique médicale.
L’ensemble de ces travaux pourrait conduire à un changement de la pratique médicale et à l’élaboration de recommandations par les conférences de consensus européennes et internationales pour la prise en charge des cancers gynécologiques. Le groupe de travail international envisage le lancement d’un large essai clinique de phase III Européen qui évaluerait l’utilité d’une optimisation de la chimiothérapie chez les patientes atteintes de cancer de l’ovaire de mauvais pronostic en rapport avec un score KELIM défavorable.
Demain, une application connectée
Afin de démocratiser et simplifier l’utilisation du KELIM CA-125, les HCL ont prévu de développer une application numérique, connectée au dossier patient informatisé, dans laquelle sera renseigné le taux circulant de CA-125 à chaque cure de chimiothérapie. Le résultat rendu par l’application guidera le clinicien dans la décision de poursuivre ou modifier le traitement. Une version beta existe déjà, et une collaboration avec une entreprise est envisagée pour porter le développement et les démarches réglementaires associées à ce futur dispositif médical numérique.
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Au regard de sa rareté, la prise en charge du cancer de l’ovaire exige la mobilisation et l’expertise de tous les professionnels de santé concernés. Une réunion de concertation pluridisciplinaire multi-sites a été mise en place dès 2019 pour optimiser les décisions thérapeutiques et l’Institut de Cancérologie des HCL continue d’intensifier sa recherche pour développer des traitements innovants et apporter des solutions à chaque patiente atteinte d’un cancer de l’ovaire.