Prévention, rééducation, transmission : les multiples missions de Mathilde Allardon, enseignante en activité physique adaptée
C’est à l’adolescence qu’elle a commencé à s’investir pour les autres par le biais de la pratique sportive. Ses premières interventions ont commencé avec des enfants de trois et quatre ans. Entre 17 et 24 ans, tous ses samedis matin étaient consacrés à l’éveil sportif auprès de ce jeune public, pour le compte de la mairie de Saint-Priest. C’est sans doute l’une des raisons pour lesquelles, après un Bac en arts appliqués, elle a bifurqué en intégrant l'Unité de formation et de recherche en sciences et techniques des activités physiques et sportives (UFR Staps), rattachée à l’université Lyon 1. Elle découvre l’activité physique adaptée et c’est en quelque sorte une révélation : « La discipline m’a plu tout de suite. Elle m’a fait comprendre qu’un déficit ou une situation de handicap n’était pas rédhibitoire pour pratiquer une activité physique. Il suffit de s’adapter à la personne, de prendre le temps de la réflexion pour analyser ce qui peut être réalisé, en dehors des protocoles habituels. »

« L’aspect sanitaire et hospitalier m’attirait depuis longtemps »
Mathilde est enthousiaste, vive et volontaire. Elle redouble d’efforts et décroche sa licence en 2019. Elle aurait pu commencer à travailler, dans une association, une structure médico-sociale, en EPHAD, etc. Mais elle choisit de poursuivre pour obtenir le master en intervention et gestion des activités physiques adaptées et santé. « Mon stage à l’HFME correspond à mes attentes : l’aspect sanitaire et hospitalier m’attirait depuis longtemps. » Au contact des enfants suivis à l’Escale, le service de médecine physique et réadaptation pédiatrique de l’hôpital Femme Mère Enfant, à Bron, elle apprend énormément. Le service accueille des enfants atteints de paralysie cérébrale principalement, et de maladies neuromusculaires. « Il faut être bienveillant et rassurer les parents, en démontrant que les enfants bien qu’étant en situation de handicap peuvent et, surtout, doivent pratiquer des activités physiques qui leur permettront d’améliorer leur quotidien. »
Un nouveau souffle en rééducation
Après les études, Mathilde exerce en libéral et à mi-temps dans le centre du diabète des HCL, Diab-e-Care. Quelques mois plus tard, un poste à plein temps s’ouvre à l’hôpital Louis Pradel. « Je postule et j’obtiens ce nouveau poste. Je lâche l’activité libérale, découvre la cardiologie et approfondit ma connaissance de la patientèle adulte. » Enthousiaste, l’EAPA se documente sur la spécialité cardiologique, rencontre les médecins, conçoit des programmes adaptés aux capacités physiques de ses patients. Entourée par « une équipe de kinés très accueillante », dit-elle, elle prend ses marques rapidement et parvient à dynamiser la rééducation cardiaque à la satisfaction des patients et des professionnels de l’équipe qui apprécient particulièrement l’énergie et la créativité de la nouvelle recrue.
L’équipe, rattachée au service des explorations fonctionnelles cardiovasculaires, est composée d’un kinésithérapeute et de deux EAPA dont Mathilde. « La cardiologie du sport est passionnante. Nous sommes vigilants aux signes cliniques des patients avec lesquels les échanges sont nombreux et quotidiens. Pas un jour qui ne se ressemble. Les patients se livrent en confiance et au fil des séances de rééducation, des liens se nouent. » L’activité physique adaptée régule la tension artérielle, améliore la forme physique, « et si la condition physique est bonne, le cœur sera moins sollicité », vulgarise l’enseignante.
Les enseignants en activité physique adaptée (EAPA) travaillent en relation avec d’autres professionnels de santé, dont les kinésithérapeutes avec lesquels parfois ils sont confondus. « Les EAPAS ont une approche bio-psycho-social du patient alors que les kinés, plus analytique.», dit-elle, avant de préciser : « Aujourd’hui, notre profession est mieux connue. » Les enseignants en activité physique adaptée ont été aussi perçus comme des « animateurs », ce qui a pu freiner leur intégration dans les parcours de soins. Aujourd’hui, leur valeur ajoutée dans la prévention et la rééducation, qui est prouvée scientifiquement, est davantage reconnue.
Une vision globale du patient
Avec des patients âgés de 30 à 80 ans, en attente de greffe, en insuffisance cardiaque ou en post-infarctus, l’activité physique peut sembler risquée. Mais Mathilde se veut rassurante, rappelant la proximité médicale obligatoire pour toute activité et la vigilance constante qui lui permet de déceler d’éventuels signes cliniques annonciateurs d’un malaise cardiaque.
« Les exercices s’adaptent à chacun, sachant que l’objectif est d’améliorer leur quotidien et éviter les risques de récidive et que leur état de santé ne se dégrade. De plus, la diversité des pratiques permet que chaque patient trouve une activité physique qui lui plaise. Gym douce, volley, vélo, mini-golf, tennis de table, l’éventail des choix est plutôt large. »
Dans leurs parcours de soin, les EAPA représentent un repère important. « Il n’est pas rare à la dernière séance que l’émotion nous gagne. » L’essentiel pour Mathilde est que les patients poursuivent l’activité physique après les séances de réentrainement à l’effort. « On les incite à se projeter dans l’après dès la première séance. Nous les aidons à trouver des clubs sportifs, des associations, en nous adaptant à toutes les bourses, à toutes les situations familiales. Nous tentons de les motiver sur le long terme, ce qui n’est pas facile car la plupart n’étaient pas habitués à pratiquer un sport. »
Une fois par semaine, les deux EAPA du service, la docteure Sophie Lamoureux, cheffe du service et un kinésithérapeute se réunissent pour faire le point sur chaque patient suivi en rééducation. « En tant qu’enseignant en activité physique adaptée, nous décelons des problématiques qui n’apparaissent pas forcément pendant la consultation médicale. Quand les patients se plaignent de douleurs au moment de l’effort, nous pouvons alors les orienter plus rapidement vers les examens médicaux adéquats. »
Chaque année, Mathilde et ses consœurs et confrères organisent des stands de prévention dans le hall de l’hôpital, accessibles à tous, enfants et adultes. Depuis 2024, ils participent aux Hôlympiades des HCL, - unique événement rassembleur et festif ouvert à tous les professionnels du CHU de Lyon -, l’occasion de se faire connaître et de montrer la polyvalence de leurs missions. Concernant l’avenir, Mathilde le voit avec optimisme : « Les EAPA jouent un rôle prépondérant dans le domaine de la prévention et de la rééducation. Avec le vieillissement de la population et les besoins en prévention, nos compétences seront de plus en plus sollicitées. Je n’ai pas de doute que de nouvelles opportunités professionnelles vont être créées, ce qui favorisera la reconnaissance au niveau national de notre statut, de nos connaissances et de nos expertises. »
- Hôpital Louis Pradel - Établissement
- Groupement Hospitalier Est - Rubrique
- Team médecine - Rubrique
- #TeamHCL : Découvrez nos métiers - Rubrique
Vers la reconnaissance d’une profession au cœur du soin
À l’hôpital, les enseignants en activité physique adaptée (EAPA) occupent une place de plus en plus prépondérante dans les parcours de soin et dans la mission de prévention, notamment en oncologie, en gériatrie ou en pédiatrie. La loi de 2016, qui autorise la prescription médicale d’activité physique pour les patients atteints d’affections de longue durée, est venue conforter il y a plusieurs années déjà une plus grande intégration des EAPA dans le parcours de soin. Pourtant, leur statut de professionnel de santé à part entière ne leur est pas encore reconnu réglementairement au sein de la fonction publique hospitalière. Au fil de leur implantation progressive au sein de l’hôpital, identifiés comme exerçant un nouveau métier émergent, les EAPA ont ainsi été recrutés selon des modalités hétérogènes, ne facilitant pas la lisibilité de leur rôle au sein des équipes de soin et leurs perspectives individuelles de carrière. Alors que la prévention des vulnérabilités, illustrée notamment par la dynamique du sport-santé, prend aujourd’hui toute sa place parmi les priorités stratégiques des HCL, le CHU a mené en 2024 une réflexion conjointe avec les enseignants en activité physique adaptée intervenant dans tous les groupements hospitaliers afin de définir un parcours de carrière clair et lisible, valorisant leur fonction à la hauteur de leur niveau de formation (licence ou master STAPS-APA) et de leur compétence et expertise au service du patient. Cette évolution, à l’œuvre depuis avril 2025, permet, dans l’attente d’une possible mesure à l’échelle nationale, d’assurer une reconnaissance concrète au métier d’EAPA au sein des HCL pour ses propres professionnels et une attractivité réelle pour les candidats souhaitant rejoindre la #TeamHCL.