Hôpital Louis Pradel : un demi siècle au cœur de l'évolution médicale
© Hôpital cardiologique, image extraite du reportage de l'ORTF du 17 octobre 1969 - archive INA
En ce samedi 1er novembre 1969, les regards des professionnels français et européens se tournent vers Lyon, et plus précisément vers cet établissement unique doté d’un plateau technique parmi les plus modernes. L’hôpital cardiovasculaire et pneumologique regroupe des services, hier dispersés dans les hôpitaux Edouard Herriot, de la Croix-Rousse et de l’Antiquaille. Sont ainsi réunis, sur un même site, les services de cardiologie et de cardiochirurgie, les services de biologie, les laboratoires d’explorations fonctionnelles et l’unité de recherche cardiovasculaire. Le nouvel hôpital peut ainsi répondre à sa mission de soin, d’enseignement et de recherche.
À l’époque, les Pr Roger Froment, père de l’école cardiologique lyonnaise, André Gonin et André Perrin dirigent les services de cardiologie adulte. Le Pr Jean Normand dirige en précurseur le service de cardiologie infantile, et le Pr Jean-Pierre Delahaye, celui des soins intensifs. Plus tard, le Pr André Bozio sera aux commandes de l’unité de cardiologie générale adulte adjointe au service de cardio infantile, et le Dr Paul Touboul à celles de la deuxième unité de soins intensifs. Les explorations non invasives sont reliées au service d’hémodynamique que dirigeront Jacques Beaune puis Gérard Finet. Bien entendu, ces services sont en lien avec ceux de chirurgie cardiaque, réanimation post-opératoire, radiologie, biologie et médecine nucléaire.
C’est là aussi qu’est créé le dossier de soins infirmiers au début des années 1970, sous l’impulsion de Geneviève Déchanoz, infirmière générale (témoignage). Dès lors, cette organisation hospitalière va démontrer sa capacité à innover, tout en assurant des soins de haute qualité.
Succès de la cardiologie interventionnelle
La cardiologie interventionnelle est aujourd’hui une spécialité médicale à part entière, très dynamique. À Lyon, dès les années 1960, des médecins en ont ouvert la voie. Le Dr Paul Touboul développe ses études électrophysiologiques intracavitaires. Les premières angioplasties coronaires lyonnaises (une sonde élargit l’artère rétrécie à l’aide d’un ballonnet gonflable) sont pratiquées en 1978. Deux ans plus tard est créé le laboratoire de cathétérisme. Et, en 1992, pour la première fois aux HCL, on ferme un canal artériel par cathétérisme. Trois ans plus tard, une astreinte de cardiologie interventionnelle est mise en place 24 heures sur 24, sept jours sur sept. La même année, la première angioplastie primaire à la phase aiguë de l’infarctus du myocarde* est réalisée.
Ces innovations thérapeutiques conjuguées à la vitesse d’intervention du Samu et à la disponibilité des unités de cardiologie interventionnelle de terrain ont permis de réduire le taux de mortalité à trente jours, de 10,2 % en 1995 à 2,1 % en 2015. En 2008, nouvelle innovation avec le premier remplacement d’une valve aortique sans chirurgie (méthode Tavi). En 2017 ouvre l’unité d’abords vasculaires, suivie l’année suivante du service de chirurgie vasculaire. L’innovation c’est aussi la pharmacologie clinique qui améliore les traitements de l’hypertension artérielle, l’insuffisance cardiaque, les arythmies. Dans le domaine, notons le rôle tenu par le Pr Jean-Pierre Boissel en tant que promoteur éclairé des premiers grands essais cliniques multicentriques en France.
Fabuleuses chirurgies
La chirurgie cardiaque stimule la créativité. Lyon caracole, là encore, au sommet de la recherche et de l’expérimentation. La chirurgie à cœur ouvert a été développée entre Rhône et Saône par les Pr Pierre Marion et Pierre Michaud dès 1958. Pierre Michaud et son équipe réalisent la première transplantation cardiaque lyonnaise le 11 novembre 1968. Et en 1969, les professeurs Pierre Marion et Georges Dureau (plus de 500 transplantations au cours de sa carrière) réalisent la première transplantation cardiaque à Louis Pradel. À la même époque, les prothèses valvulaires artificielles permettant de sauver des vies supplémentaires sont largement utilisées à Lyon. Puis, les bioprothèses (valvules de porc) font leur apparition. Dans les années 1980 et 1990 se développent de nouveaux procédés dans le traitement de la valve mitrale (valve permettant le passage du sang oxygéné de l’oreillette gauche vers le ventricule gauche). Le Pr Jean-François Obadia excelle dans sa réparation. En 1983 ouvre le service d’anesthésieréanimation, le B16, dirigée par l’emblématique Pr Suzanne Estanove dite « la maman ».
L’assistance circulatoire externe pour les patients en attente de transplantation fait son arrivée. En 1982, l’apparition de la ciclosporine, puissant médicament antirejet, avait déjà commencé à modifier le pronostic de transplantation. La première greffe cardiaque pédiatrique chez un enfant de dix ans est réalisée en 1987, et en 1989, l’équipe des Pr Gérard Champsaur et Jean Ninet intervient sur un enfant de deux jours, réussissant la première greffe cardiaque néonatale de l’hôpital. Cette année-là, une autre première est réalisée à Lyon : une greffe mono pulmonaire gauche, que l’on doit au docteur Jean-Paul Gamondes. Suivront d’autres premières, d’autres innovations. Aujourd’hui, l’hôpital Louis Pradel est l’un des principaux centres français de transplantation cardio-pulmonaire, où sont greffés plus de 50 patients chaque année. Et l’innovation n’a jamais cessé. Ainsi, depuis deux ans, on pratique avec succès la fermeture de l’auricule gauche par une intervention chirurgicale peu invasive. Depuis 1969, l’hôpital concentre des expertises de pointe.
*En moyenne on compte 80 000 infarctus du myocarde par an en France, dont environ 12 000 décès.
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