Examen clinique à objectifs structurés : une organisation de haute précision

Dans les couloirs du centre d’examen implanté sur le site de Laennec, 250 étudiants en quatrième année sont attendus dans la journée pour passer l’examen clinique à objectifs structurés (Ecos).

Aujourd’hui, ce sont des étudiants en quatrième année qui passent, pour la première fois, l’examen clinique à objectif structuré (Ecos). Cet examen compte pour le certificat de compétences cliniques, validant le deuxième cycle des études de médecine. Dans deux ans, ces mêmes étudiants passeront les Ecos nationaux de fin de sixième année qui compteront pour 30 % de la note finale au classement national des étudiants, en vue de l’attribution de leur affectation d’interne.

250 étudiants évalués par jour

Dans les couloirs du centre d’examen, implanté sur le site de la faculté de médecine Lyon Est, site de Laennec, cinq groupes de vingt-cinq étudiants sont attendus dans la matinée et autant dans l’après-midi, soit 250 étudiants évalués par jour durant cette deuxième session de l’année organisée après celle de mai qui a vu passer les cinquième année.  

Les étudiants s’apprêtent à suivre un parcours millimétré savamment orchestré. La matinée commence là où elle se terminera, dans un amphithéâtre et sous bonne surveillance, pour éviter toute fuite d’informations. Au sol, des sacs de toile aux couleurs du groupe auquel les étudiants vont être rattachés tout au long des cinq stations (ou scénarii) d’évaluation, contiennent leurs affaires personnelles dont les téléphones portables. 

Puis les étudiants sont conduits dans la salle de briefing. Une vidéo, conçue par les organisateurs, leur explique comment va se dérouler l’examen. Ensuite, c’est au tour de la docteure Sophie Schlatter (Lyon 1/Reshape) de prendre la parole. Elle invite les étudiants à répondre à un questionnaire. Il s’agit de participer au programme de recherche que la docteure en science mène, impulsé par Gilles Rode, PU-PH (Lyon 1/HCL) et doyen de la faculté de médecine de Lyon Est.  L’investigation vise à identifier les déterminants du bien-être et de la performance des étudiants dans le but à terme de proposer une prévention personnalisée du stress. 

Soudain, un message enregistré indique que la première station va débuter. En file indienne, tous se dirigent vers la station qui leur a été attribuée. Chaque station dure environ sept minutes et comporte entre 15 et 20 items. Puis, un feed-back de deux minutes est prévu qui leur permet de se situer par rapport aux attendus. Notons que les évaluateurs ignorent la valeur des items.

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Les étudiants en fil indienne
Dans le couloir du centre d'examen, les étudiants vont se placer devant leur station respective.

Une performance qui rassure 

La tension est palpable. Après plusieurs dizaines de seconde, les haut-parleurs font enfin entendre l’annonce qui donne le coup d’envoi. Les étudiants prennent connaissance du sujet. Les sept minutes de l’épreuve commencent à ce moment précis. Le parcours d’évaluation durera une cinquantaine de minutes, soit 45 minutes d’examen et une minute de rotation entre chaque station.  

Les externes (1) frappent à la porte avant de se présenter et de s’assurer du consentement du patient avant l’examen, le cas échéant. « Les mentalités ont évolué. Cette entrée en matière n’était pas la règle il y a encore quelques années », commente Alice Blet, PU-PH (HCL/Lyon 1) évaluatrice aujourd’hui et future co-organisatrice des Ecos à la rentrée prochaine.  

Les vagues se succèdent avec fluidité. L’organisation mise en œuvre par la Dr Marion Cortet, MCU-PH (Lyon 1/HCL), présidente de la commission hospitalière de la formation en santé aux HCL et le Dr Marc Lilot force l’admiration. Ces deux professionnels hospitalo-universitaires se complètent, chacun apportant à l’autre ses compétences, sa rigueur et son enthousiasme. « Nous travaillons depuis deux ans à mettre en place un process dans le but d’améliorer l’outil d’évaluation et cela de façon reproductible », commente le Dr Marc Lilot.

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Marion Cortet et Marc Lilot
Marion Cortet et Marc Lilot, organisateurs des Ecos à Lyon

 

L’organisation réunit pas moins de 45 évaluateurs et référents « circuit », principalement des CCA (chefs de clinique des universités-assistants des hôpitaux) des Hospices Civils de Lyon. « C’est un travail d’équipe où chaque maillon de la chaîne à son importance », fait remarquer Cécile Chenavas. Dans le centre de supervision, l’ingénieure pédagogique et Karima Chiter, gestionnaire de scolarité, à la faculté de médecine Lyon Est, suivent en temps réel le déroulement des épreuves sur une plateforme numérique de gestion des examens et d’évaluations en ligne. 

 

Les coches vertes indiquent que l’étudiant a répondu aux attentes ; dans le cas contraire, les coches sont rouges. Ce suivi en direct donne le détail des évaluations par item pour chaque étudiant, en connexion avec les évaluateurs qui portent la responsabilité de leur évaluation. Il permet également d’identifier un éventuel item problématique quand ce dernier, comme c’est le cas ce matin, a été coché en rouge par tous les évaluateurs. La plateforme numérique enregistre le détail de toutes les évaluations, produisant ainsi des données qui seront analysées dans le but d’améliorer l’acquisition des compétences et l’harmonisation des examens.  

Dans la salle de pause, nous retrouvons Loïc et Eleonore, tous deux comédiens. Ils comptent parmi ces professionnels du jeu auxquels l’organisation a recourus via l’École nationale supérieure des arts et techniques du théâtre, pour interpréter le rôle des patients. « Je joue une femme de 53 ans qui peine à déglutir. Notre scénario envisage toutes les réponses possibles. La volonté est d’être réaliste en conservant une certaine bienveillance », précise Eleonore. « Pour ma part, complète Loïc, je suis le père d’un enfant de 14 mois qui ne marche pas encore et qui s’inquiète d’une éventuelle maladie génétique dont mon frère est porteur. » 

Après avoir passé les cinq stations et avant d’être reconduits dans l’amphithéâtre, chaque groupe d’étudiants se retrouve dans la salle de defusing pour relâcher la pression. « Il arrive que des étudiants soient en difficulté émotionnelle », informe la Dr Marion Cortet. Ce temps d’échanges et de partage est alors d’autant plus important pour atténuer l’impact émotionnel que l’examen aurait pu avoir sur certains. Nous y retrouvons Sophie Schlatter qui interroge les étudiants afin de recueillir leurs appréciations du questionnaire. La pertinence des remarques va sans doute contribuer à améliorer le programme de recherche. Concernant l’organisation, une étudiante exprime spontanément l’avis général : « Elle est performante et a contribué à réduire notre stress. »  Un bon point pour les organisateurs qui sont particulièrement attentifs à créer un environnement propice à la réussite.

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Salle de defusion
En salle de defusing, Sophie Schlatter interroge les étudiants sur le questionnaire EcosPerf.

Du terrain hospitalier à la simulation et vice-versa 

À 13h10, les Ecos du matin se terminent. Dans l’amphithéâtre, l’ambiance est animée. Max partage ses impressions : « J’ai eu un peu de stress, tempéré par le fait que nous avions été préparés par les ECOS blancs en décembre, et le fait qu’on ne peut pas vraiment anticiper les sujets. La station la plus marquante a été celle de médecine générale avec une patiente qui avait du mal à déglutir parce qu’elle m’a paru la plus naturelle, la plus proche du terrain. La station du bilan biologique a été la plus déstabilisante parce qu’on ne s’adressait à personne, (la simulation ne prévoyait pas de comédien, ndr). Il est étrange de transmettre un bilan à une personne qui n’existe pas. » 

Pour Marion, le stress est présent « parce qu’on ne sait sur quelle situation on va tomber ». Elle juge que l’évaluation du savoir-être est une bonne chose : « Un médecin ne doit pas juger. Cela permet aussi de doser les infos qu’on transmet. » Quant aux comédiens, ils sont « plutôt bons et bienveillants », dit-elle. 

Ce matin, les qualités cliniques des étudiants ont pu être évaluées à travers cinq stations et autant de sujets différents. Pour Marion Cortet, il ne fait pas de doute que « Un bon relationnel ne va pas sans la maîtrise de la technique. » De même qu’un pianiste ne peut exprimer pleinement sa sensibilité sans la maîtrise de son art, les médecins doivent connaître la technique et la théorie pour prodiguer un soin clinique de qualité. Et pour parfaire ces qualités, les externes peuvent compter sur les stages hospitaliers, « C’est le stage à l’hôpital qui nous apprend à consolider nos connaissances théoriques et cliniques », assurent les deux étudiantes, relevant l’importance des stages hospitaliers comme terrain d’apprentissage. Ces mêmes stages hospitaliers qui, demain, pourraient être évalués à partir d’une ou deux stations issues de ces nouvelles modalités d’évaluation.

 

(1) Etudiants en médecine de 4e, 5e et 6e année.

 

Dernière mise à jour le : jeu 29/02/2024 - 15:56
Blocs libres

Exemple de sujet : « Madame Glacie, femme de 30 ans »
« Vous êtes interne en début de premier semestre d’internat. Vous êtes le premier arrivé dans le cabinet du praticien où vous êtes en stage […]. Alors que vous traversez le cabinet vous retrouvez dans la salle d’attente votre première patiente à terre, elle semble inconsciente. C’est la troisième fois que vous la voyez et vous savez qu’elle est diabétique. Dans votre cabinet, vous disposez d’une bouteille d’oxygène pleine, d’un ballon à valve unidirectionnel […]. Vous disposez de moins de sept minutes pour : 
- Examiner la patiente et effectuer votre bilan, en verbalisant ce que vous recherchez
- Réaliser le premier geste d’urgence
- Vous ne devez pas conditionner ou perfuser le patient
- Vous ne devez pas réaliser de geste invasif ou douloureux sur l’acteur, les résultats de vos actions seront affichés sur les dispositifs. »