Dans les coulisses de la commission médico-soignante
La première intervention est portée par Damien Nivesse, faisant fonction de cadre supérieur de santé en rééducation à l’hôpital de la Croix-Rousse. Il présente le dispositif d’accès direct aux soins en orthophonie et kinésithérapie, inscrit dans la loi depuis 2023. L’objectif ? Faciliter l’accès des patients à ces soins sans prescription médicale préalable, dans le cadre hospitalier.
Ce dispositif est déjà en place dans plusieurs pays européens et enseigné en formation initiale. Il s’applique à des situations bien identifiées, comme les retards de prescription ou les sollicitations hors du circuit médical habituel, rappelle Damien Nivesse.
Aux HCL, certaines pratiques relèvent déjà de cette logique : kinésithérapie post-opératoire sans prescription immédiate, évaluation orthophonique de la déglutition sur demande infirmière... La présentation du cadre à la commission médico-soignante poursuit l’objectif de sécuriser des pratiques existantes, en les inscrivant dans un cadre réglementaire clair. Son intervention ne pose pas de problématique spécifique.
Il est décidé que son déploiement, progressif, débutera dans des unités pilotes et des formations accompagneront les équipes afin d’assurer des adressages pertinents. Enfin, une présentation en commission médicale d’établissement (CME) est prévue pour obtenir un vote formel, « nécessaire pour l’inscription du dispositif dans le projet d’établissement », rappelle le cadre de santé. Une étape indispensable à sa généralisation.
Un protocole de coopération en débat
Le deuxième point à l’ordre du jour soulève un débat plus complexe : celui d’un protocole local de coopération autour de l’activité d’une équipe médicale et d’une infirmière qui prennent en charge des patients atteints de cancer traités par immunothérapies. Cette activité est en pleine croissance avec 1 700 traitements délivrés en 2024 contre 1 000 en 2021.
Dans cette organisation, l’infirmière de coordination joue un rôle clé. « Elle est une cheville ouvrière essentielle », souligne le médecin. Forte d’une douzaine d’années d’expérience, elle coordonne le parcours du patient : suivi, organisation des séances, collaboration avec l'équipe médicale. Le protocole proposé vise à reconnaître et encadrer formellement des missions élargies, incluant des actes dérogatoires (prescription de bilans biologiques, gestion des effets indésirables, examens d’imagerie...).
La discussion s’engage alors sur la portée de ces délégations d’actes. Plusieurs membres de la commission s’interrogent sur l’absence d’orientation vers la pratique avancée. Ce point soulève une tension de fond : jusqu’où peut aller un protocole de coopération sans empiéter sur le champ réglementé des IPA ? Si le protocole répond à un besoin réel et formalise des pratiques existantes, certains actes envisagés (prescription d’examens, renouvellement de traitements) semblent sortir du cadre prévu.
Des propositions émergent pour réajuster le périmètre et la formulation du protocole : limiter les actes dérogatoires les plus sensibles, intégrer une formation théorique et pratique structurée, avec évaluation, dépersonnaliser le protocole pour le rendre reproductible à d’autres professionnels, assurer un rapport annuel à l’agence régionale de santé, conforme à la réglementation, rappellent la Pr Élise Perceau-Chambard et Carol Gendry, les co-présidentes de la commission médico-soignante.
Entre réalité de terrain et cadre réglementaire
Ces débats illustrent des enjeux liés à l’évolution des pratiques de terrain, dictée par les besoins cliniques, et le cadre réglementaire plus ou moins rigide. Ici, deux logiques se confrontent : celle du soin et celle de la réglementation et des compétences liées à un exercice. Pour autant, la séance se conclut sur une dynamique constructive.
Certains membres de la commission accompagneront l’évolution du protocole pour le soumettre au vote de la CME et de la commission des soins infirmiers, de rééducation et médico-techniques (CSIRMT). Un retour d’expérience pourrait être demandé un an après sa mise en œuvre.
Depuis septembre 2021, les membres de la commission médico-soignante se réunissent sous l’égide de la commission médicale d’établissement pour renforcer les liens entre les métiers soignants. Toutes et tous sont portés par cette volonté d’améliorer ensemble les pratiques et les prises en charge médicales et paramédicales.
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L’infirmière de coordination joue un rôle clé. Elle coordonne le parcours du patient : suivi, organisation des séances, collaboration avec l'équipe médicale. Le protocole proposé vise à reconnaître et encadrer formellement des missions élargies, incluant des actes dérogatoires.