« J’aime la pluralité des pratiques », Nathalie Hoen, gynécologue obstétricienne à l'hôpital Lyon Sud

Elle consulte, opère, répare les corps mutilés… Si elle a choisi la médecine, c’est pour soigner les femmes.

Et soigner, dit-elle, c’est prendre en charge la personne dans son entièreté. Chaque patiente qu’elle voit en consultation vient avec son histoire, son passé, ses singularités. Parmi les récits, certains disent une réalité tragique. Viols, agressions, mutilations, mises en danger de sa propre vie, les traumatismes peuvent être nombreux. D’autres racontent la vie, l’espoir et l’amour…

Gynécologue obstétricienne à l’hôpital Lyon Sud depuis 2017, Nathalie Hoen répare ce qui relève de sa discipline. Elle pratique notamment la chirurgie de réparation des mutilations sexuelles, telles que l’excision et l’infibulation. L’Unicef estime à 200 millions, le nombre de jeunes filles et de femmes dans le monde victimes de mutilations génitales (1).
« La prise en charge est globale, associant chirurgie, psychologie, assistance sociale, projet de vie… », explique-t-elle.

Cette activité représente environ 5 % de sa pratique hospitalière. Le reste du temps, elle traite les pathologies gynécologiques, tout particulièrement la chirurgie des cancers du sein et des cancers de l’utérus, la chirurgie des prolapsus, des anomalies utérines, de la fertilité. Elle suit les patientes en consultations et prodigue les soins liés à la maternité.

« J’ai choisi la gynécologie obstétrique parce que je voulais soigner les maux des femmes. Autre raison : participer à la naissance d’un bébé, c’est merveilleux. Et aussi parce que la spécialité est variée, avec de la chirurgie, du médical, de la cancérologie, du fonctionnel. J’aime cette pluralité de pratiques. »

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Nathalie Hoen, bras appuyés sur une balustrade
Nathalie Hoen, gynécologue obstétricienne à l'hôpital Lyon Sud

Elles accouchaient en silence, sans un bruit…

Sa vitalité, elle la puise dans le soin. De ses années d’internat à ses expériences à l’étranger, elle a fait montre d’une énergie à toute épreuve. Lors de son premier semestre d’interne en salle d’accouchement, elle indique aux sages-femmes qu’elles peuvent l’appeler à tout moment, jour et nuit. « Tous les jours mettre au monde des enfants, c’est incroyable ! » Elle retient de ces premiers six mois, « la gentillesse des sages-femmes qui ont eu à cœur de lui apprendre à bien accoucher les femmes. »

Pendant l’internat, elle remplit des missions humanitaires. En Jordanie, dans un camp de réfugiés syriens, elle accouche des femmes dans des conditions spartiates, sous tente, loin de l’environnement médicalisé et réglementé qu’elle connait habituellement : « Elles accouchaient en silence, sans un bruit… » Elle en profitera pour apprendre quelques rudiments d’arabe qui lui servent encore aujourd’hui. Plus tard, elle assurera une autre mission humanitaire, cette fois-ci dans des conditions encore plus difficiles, à Calais, dans cette « jungle » aujourd’hui démantelée.

Un esprit en mouvement

Après son internat, durant lequel elle a pu s’orienter vers la chirurgie gynécologique et se former en cancérologie et aux pathologies fonctionnelles, et ses deux années de clinicat, elle choisit définitivement le deuxième CHU de France, et plus précisément l’hôpital Lyon Sud. Elle y apprécie le climat de travail et aussi parce qu’il y a « un patron aux qualités pédagogiques remarquables », dit-elle en mentionnant le Pr François Golfier, chef du service de gynécologie-obstétrique. De plus, son implantation à mi-chemin de la mer et de la montagne satisfait cet esprit frondeur, toujours en mouvement.

D’ailleurs, avant de prendre son poste en 2017, elle s’est offerte une année de voyage et de découvertes, une année plutôt active, émaillée de remplacements. Elle reste un mois et demi à Mayotte dans la plus grande maternité de France, en profite pour plonger avec les tortues… Suivront l’Océanie, l’Asie et la Haute-Savoie où elle passe quelques mois à l’hôpital de Sallanches, avant le retour à Lyon. Deux ans après sa prise de poste, elle expérimentera à son tour la maternité en donnant naissance à Angèle.

Une médecine heureuse et chaleureuse

Ce qu’elle aime le plus dans sa profession, c’est pouvoir répondre au mieux et dans la limite de ses possibilités médicales à tous les besoins des femmes « en offrant une prise en charge à la pointe de la technologie selon les recommandations scientifiques », précise-t-elle. La médecine, elle la conçoit « humaine, heureuse et chaleureuse », une force qui lui permet d’affronter des situations parfois extrêmes.

Cette année, elle participe à la création de La Maison des femmes, dont l’ouverture est prévue au premier trimestre 2024 sur le site de l’hôpital Edouard Herriot. Cet espace conçu sur le modèle de celle fondée en Seine-Saint-Denis en 2016, viendra en aide aux femmes victimes de tous types de violence. À la fois, centre d'accueil, de consultation et de prévention, seront présents des professionnels de santé, du droit et de la justice. Nul doute que dans cet espace d’écoute, de soins et de protection, les qualités de la Dr Hoen seront mises à contribution.

 


(1) L’excision, c’est l’ablation partielle ou totale du clitoris externe et de son capuchon ou prépuce, et ou des petites et des grandes lèvres. L’infibulation, c’est le rétrécissement de l’orifice vaginal par recouvrement en repositionnant les petites ou les grandes lèvres, par suture. La chirurgienne va alors s’appliquer à disséquer la partie profonde du clitoris conservée sous la peau afin de le mettre au jour et de l'arrimer superficiellement à sa place naturelle. Après l’opération, environ un tiers des femmes retrouvent la sensation de plaisir.

Dernière mise à jour le : jeu 18/01/2024 - 13:52