Des robots de téléprésence au service du lien social en pédiatrie
Maintenir le lien avec leurs frères et sœurs, continuer à se chamailler, jouer avec eux, conserver leur rôle au sein de la famille dont ils peuvent se sentir exclus lors de leur hospitalisation, tels sont les principaux points forts décrits par les jeunes patients. Pour leurs parents, les mêmes avantages sont évoqués et ils estiment en outre que cette technologie peut améliorer l’état psychologique de leur enfant.
L’usage de robots de téléprésence en pédiatrie hémato-cancérologique pour rompre l’isolement entre l’enfant hospitalisé et ses proches est-il bénéfique ? Une étude exploratoire a été menée pendant 2 ans à Lyon. Au total, 17 patients (8 filles, 9 garçons) âgés de 8 à 23 ans et leurs familles, ainsi que 15 professionnels de santé ont été inclus dans l’étude.
"Les résultats sont extrêmement positifs et engagent à la poursuite du projet, voire à son développement dans d’autres établissements de pédiatrie en France ou auprès d’adultes malades hospitalisés sur de longues durées et ayant des enfants en bas âge", explique le Dr Perrine Marec-Bérard, administrateur de l’Institut d’Hématologie et d’Oncologie Pédiatrique de Lyon, pédiatre-oncologue à l’origine de ce projet.
Les objectifs
Les objectifs de cette étude étaient aussi d’identifier d’éventuelles difficultés ou points négatifs. Ces résultats révèlent effectivement certaines limites comme des difficultés d’ordre technique (connexion informatique essentiellement), ou des difficultés psychiques ou physiques : inquiétudes des parents liées à la faible utilisation lors des moments de fatigue de l’enfant, ou pour l’enfant frustration de ne pouvoir assister réellement à l’événement qu’il visualise ou de devoir se déconnecter pour un soin. Néanmoins, les bénéfices restent pour tous supérieurs aux inconvénients.
Les soignants, favorables à l'étude
Les conclusions de l’étude menée auprès des soignants sont aussi favorables à la poursuite du projet. 15 auxiliaires de puériculture, infirmiers et médecins de l’unité protégée de l’IHOPe ont été rencontrés durant la même période afin d’identifier les moteurs et les freins dans leur pratique quotidienne.
Les soignants notent que « l’enfant peut « être content de leur présenter son environnement », sa maison, ses frères et sœurs. L’importance du lien avec la fratrie est très souvent mentionnée, avec l’idée que les patients peuvent par l’intermédiaire du robot « reprendre leur rôle à la maison », que cela leur permet de « continuer à avoir une vie la plus normale possible », explique Julie Henry qui a conduit ce travail.
Pour les soignants, une attention particulière doit être portée au maintien de la confidentialité ou encore au questionnement concernant le secret des données mé- dicales. Qui assiste vraiment aux conversations qui ont lieu dans la chambre ? Qui peut être hors champ de vision et entendre les échanges ?
Une conclusion positive
À l’issue de leurs travaux exploratoires, les scientifiques concluent très positivement et donnent trois recommandations : ne pas proposer cette solution dès le début de l’hospitalisation, préparer en amont la fratrie (surtout les plus petits), et encourager le lien direct entre l’enfant et le ou les parents autorisés à être pré- sent(s) dans la chambre pendant la durée de l’isolement. « La poursuite des investigations est recommandée par les scientifiques à l’origine de l’étude, et des études de plus grande envergure paraissent souhaitables pour confirmer ces résultats », indique le Dr Perrine Marec Bérard.
Pourquoi ce projet ? Les traitements des cancers et hémopathies malignes nécessitent pour les enfants, adolescents et jeunes adultes de longues périodes d’isolement en chambre stérile jusqu’à plusieurs mois parfois. Pendant ce temps, le jeune malade est coupé de son milieu familial, amical ou scolaire et ne peut recevoir qu’un nombre limité de visites. Dès septembre 2016, afin de maintenir le lien social entre les jeunes hospitalisés et leurs proches, les professionnels de santé de l’Institut d’hématologie et d’oncologie pédiatrique ont souhaité expérimenter une nouvelle technologie : le robot de téléprésence, déjà utilisé depuis plusieurs années dans un cadre culturel et sportif (visites d’exposition, participation à des rencontres sportives, concerts, jeux olympiques…). Afin de rompre cet isolement, les équipes médicales et soignantes de l’IHOPe en lien avec l’Association Philanthropique de Parents d’Enfants atteints de Leucémie ou autres cancers (APPEL), la société Awabot et avec le soutien de Bristol-Myers Squibb (BMS), ont mis en place en septembre 2016 le projet Victory in Innovation for Kids – electronic (VIK-e). Aujourd’hui, l’IHOPe dispose de 12 robots.
Sources : Retour sur le projet VIK-e à l’occasion de la journée Internationale du Cancer de l’Enfant 2019